Voyage autour
de ma Bibliothèque

Liste 32 : Littératures du Sud-Est asiatique (Vietnam, Malaisie-Indonésie, Philippines, Thaïlande)

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Vietnam-Laos-Cambodge

Littérature classique

N° 2337 Nguyên-Du :  Kim-Vân-Kiêu , traduction du vietnamien (annamite) en français par Nguyen-Van-Vinh, Editions Alexandre de Rhodes, Hanoi, 1942 (avec hors-texte et culs de lampe de Manh-Quynh, reliure cuir, dos à nervures, titres dorés)

N° 1585 Nguyên-Du :  Kim-Vân-Kiêu , traduction en français par Nguyen-Van-Vinh, Nhà Xuât Bân Vân Hoc, 1994, fac-simile de l’édition Alexandre de Rhodes de 1942, avec un nouvel avant-propos de Hûru Nhuân.

En fait il s’agit d’une édition bilingue, avec de très nombreuses notes et explications. Il faut dire que Nguyên-Van-Vinh était un lettré qui s’est entièrement consacré à l’édition et la traduction française du grand poète national vietnamien. C’est dès 1906 qu’il mit fin à sa carrière de fonctionnaire, se lance dans le journalisme, l’imprimerie et commence à s’occuper du poème, le transcrivant d’abord du Nôm (caractères chinois) en quôc ngû (caractères latins adaptés à la langue), puis en le traduisant en français en plusieurs étapes. La traduction française de 1942 est la troisième, la définitive. A chaque page on trouve d’abord le texte original, puis la traduction en français, enfin la traduction et l’explication de chaque mot du poème.

Note sur le système d’écriture : On pense qu’à la base le vietnamien était lié au groupe linguistique nôm-khmer d’où provient une grande partie de son vocabulaire, même s’il a adopté un système tonal comme ses voisins chinois et thaïs. Pendant longtemps les élites ont tout simplement écrit en chinois. Et puis pour écrire en vietnamien on met au point un système de transcription au moyen de caractères chinois simples ou combinés entre eux pour noter le son d’un mot vietnamien (donc une transcription phonique) ou le sens et le son combinés du mot vietnamien. Ce système d’écriture s’appelle le chü-nom. Et puis, au début du 17 ème  siècle, arrivent les Jésuites. Un groupe de travail est créé, composé d’érudits de différentes nationalités et animé et dirigé par le Père Alexandre de Rhodes (un Jésuite français originaire d’Avignon et qui a été le premier Supérieur d’une mission créée au Tonkin en 1626). Celui-ci publie un dictionnaire dès 1650. Le système d’écriture alphabétique qu’il a développé, appelé quôc-ngü, est encore perfectionné plus tard par un autre religieux, Mgr. Pigneau de Behaine, au 18ème siècle et par Mgr. Tabard au 19ème. Cette écriture fut d’abord progressivement introduite dans le sud où les résistances des élites sinisantes étaient moins fortes (il faut croire que la France y était pour quelque chose puisqu’elle avait obtenu la cession de trois provinces en 1861 et avait officiellement créé la colonie de Cochinchine en 1867). Au nord il a fallu attendre un peu plus longtemps. Les concours littéraires et l’étude des idéogrammes se sont maintenus jusqu’en 1912 à Hué. C’est seulement à partir de cette date que le quôc-ngü est devenu la seule graphie officielle au Vietnam. 

N° 2984 Tran-Cuu-Chan :  Etude critique du Kim-Vân-Kiêu, Poème national du Viet-Nam , Nguyen-Van-Cua, Saïgon, 1948

Il s’agit d’une thèse de doctorat présentée à la Sorbonne par Tran-Cuu-Chan, ancien Ministre de l’Education nationale du Gouvernement provisoire du Sud-Vietnam. 

Nguyên-Du (1765 – 1820) appartenait à une famille aristocrate illustre qui avait accompagné les rois Lê qui ont régné sur l’Annam depuis 1488 jusqu’en 1789 quand ils ont été chassés par une nouvelle faction politique, elle-même vaincue en 1802 par le chef d’une ancienne famille ducale qui prit alors le pouvoir, inaugurant une nouvelle ère royale. Nguyên-Du, dit Tran-Cuu-Chan, était assez malheureux de la situation politique de son pays, devant d’abord fuir les nouveaux dirigeants, puis acceptant de travailler pour la nouvelle famille royale, ce qu’il éprouvait comme une trahison. Tran-Cuu-Chan voit une certaine relation entre ce sentiment du poète et celui qu’éprouve son héroïne Thuy-Kiêu. Il avait pris le thème de son œuvre chez un conteur chinois. Une fille sauve son père de la ruine en se vendant à un homme riche, mais celui-ci est un gredin et la revend à un lupanar. A partir de ce moment elle a de nombreuses aventures, prend pour amants d’autres hommes, est à nouveau jouée, passe à un autre lupanar, devient servante, cherche à se suicider, termine chez les bonzes, et, tout à la fin, retrouve son ancien fiancé qui est toujours amoureux d’elle. Mais elle a honte et ne veut plus que rester son amie. Cela fait très roman populaire mais si cette histoire est le grand poème national c’est que Nguyên-Du en a fait une très belle œuvre poétique, tant par la forme (dont on ne peut juger en français) que par les images, les réflexions, la description des personnages, et surtout de la nature. Date de la création du poème : probablement entre 1802 et 1808, pense Tran-Cuu-Chan. 

Voir ce que j'en dis dans une note de mon Bloc-notes 2024L'Homme et la Femme "souillée"


Littérature moderne

N° 2127 Duong Thu Huong :  Les Paradis aveugles , traduit du vietnamien par Phan Huy Dong, préface de Michèle Manceaux, Editions des Femmes, Paris, 1991

N° 1583 Duong Thu Huong :  Roman sans titre , traduit du vietnamien par Phan Huy Dong, Editions des Femmes, Paris, 1992

Duong Thu Huong a fait la guerre. Elle est partie au front à vingt ans, a vécu les bombardements américains, a cru au communisme, puis n’y a plus cru, a été arrêtée en 1991, puis libérée grâce à la solidarité internationale.


Littérature coloniale


N° 4056 Henri Copin :  L’Indochine des Romans , Editions Kailash, Pondichéry/Paris, 2000

La rencontre de la France et de l’Indochine a été une rencontre passionnée, côté français au moins. Et a donné naissance à une abondante littérature. Henri Copin qui a vécu longtemps en Asie et consacré plusieurs études à la littérature née de cette rencontre, nous en offre une Anthologie. Les plus grands de ces écrivains ont déjà trouvé leur place dans la liste des écrivains francophones, en particulier Pierre Loti et Claude Farrère. D’autres sont placés dans les Romans d’aventures. Voici quelques-uns d’entre eux :


N° 3760 Roland Dorgelès :  Sur la route mandarine , Editions Kailash, 1995 

Dorgelès piétine les clichés. N’admire guère le système colonial. Mais il sait voir. Et est éberlué par « ce contraste continuel d’archaïsme et de modernisme, la rencontre insolite de ces deux civilisations que des millénaires séparent »


N° 3756 Bernard Menaut :  Sangrâma ou la chute d’Angkor , Editions Kailash, 1996

N° 3755 Gérard Groussin :  Histoire de Vessandâr, le jâtaka du roi généreux , librement adapté d’un corpus traduit du pâli en khmer par Gnok Thaém et des auteurs anonymes, Editions Kailash, 2005

Les étonnants monuments d’Angkor ont bien évidemment excité l’imagination des Français. Bernard Menaut, Landais, était médecin et a fait toute sa carrière au Cambodge dont il parlait couramment la langue. Il était le médecin personnel du Roi du Cambodge de l’époque, Sisowath, dont Norodom Sihanouk était l’arrière-petit-fils. Son roman est une très belle histoire de l’apogée d’Angkor, cour, palais et intrigues. Gérard Groussin a également vécu longtemps au Cambodge et a été pendant un moment chargé de cours de khmer à l’Ecole des Langues’O. Les jâtakas sont des contes merveilleux racontant les vies antérieures de Bouddha. Celle de Vessandâr, ce roi qui abandonne sa famille pour atteindre l’illumination est l’une de plus connues. Gnok Thaèm est né en 1903, a été bonze, a étudié le khmer, le pâli et le bouddhisme, a été traducteur, enseignant et membre de l’Institut bouddhique de Phnom Penh.


N° 3757 Solange Thierry :  Les Khmers , Editions Kailash, 2003

Réflexions sur une civilisation. Solange Thierry a été membre de l’Ecole Française d’Extrême-Orient et Conservatrice du Musée national de Phnom-Penh.


N° 3759 J. A. Pourtier :  Mékong , Editions Kailash, 1997 (Grasset 1931)

Satire plutôt féroce du milieu colonial français. Mais le roman chante aussi la douceur et la beauté du Laos et l’art de vivre de ses habitants.


N° 3758 Amphay Doré :  L’école de la forêt, un itinéraire spirituel lao , préface de G. Gardon, Editions Kailash, 1996

Amphay Doré, né de père français et de mère lao, a fait de brillantes études à la Sorbonne, Docteur en ethnologie, il est membre du CNRS. Ce livre est une sorte d'autobiographie, une expérience spirituelle (bouddhiste), mais aussi ethnologique.


Voir aussi, pour tous ces romans, mon Bloc-notes 2008 : Les Editions Kaïlash.


Malaisie-Indonésie-Singapour

Littérature classique

N° 4105 et 4106  Hikayat Hang Tuah, die Geschichte von Hang Tuah , von dem Malayischen übersetzt (en allemand) von H. Overbeck, édit. Georg Müller, Munich, 1922 (deux tomes, 650 pages). (Reliure cartonnée de l’éditeur)

N° 4736  The Epic of Hang Tuah , traduction (en anglais) par Muhammad Haji Salleh, édité par Rosemary Robson, Institut Terjemahan Negara Malaysia Berhad, Kuala Lumpur, 2010 (reliure cuir illustrée de l’éditeur, cartes, pages encadrées)

C’est la splendide histoire du preux mythique, grand guerrier et Laksama (amiral) du Royaume de Malacca. La traduction en allemand effectuée par Hans Overbeck, ce commerçant hanséatique, devenu, par pure passion, un érudit de la littérature et culture malaise, est la première traduction européenne de cette épopée. Nombreuses notes explicatives. La traduction est basée sur le texte publié en écriture latine dans les Malay Literature Series de l’éditeur Methodist Publishing House à Singapour par W. G. Shellabear.

Ce n’est que récemment que le poète malais Haji Salleh en a réalisé une traduction anglaise. Si, parmi toutes les grandes œuvres littéraires malaises,  la Couronne des Princes  et  la Chronique des Malais  sont celles qui témoignent le mieux de l’histoire des Malais de la péninsule, dit Haji Salleh, le  Hikayat Hang Tuah , lui, démontre quelles étaient leurs valeurs chevaleresques. Les Malais, dit-il, considèrent cette œuvre comme essentielle. Elle est l’une des plus longues et des plus riches sur le plan de l’imagination. Tout en rappelant les faits d’armes de l’ancien Royaume de Malacca elle se focalise sur un ancien héros culturel. « On y expose la conduite exemplaire d’un chevalier légendaire et, ce faisant, on définit ce qu’était le code de loyauté et de courage de ces guerriers totalement dévoués à leur Seigneur ».


Pour Hans Overbeck et Hang Tuah, voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 6 : O comme Overbeck, un commerçant hanséatique devenu érudit en littératures malaise et javanaise.

Voir aussi dans ce même tome 6 de mon Voyage autour de ma Bibliothèque, la note L'amok malais, où l'on trouve au paragraphe intitulé L'amok dans le Hang Tuah, une étude des nombreux amoks présents dans l'épopée, en comparant les versions d'Overbeck et de Salleh.


N° 1823  Insulinde I, Malaiische Weisheit und Geschichte. Einführung in die Malaiische Literatur. Die Krone aller Fürsten. Die Chronik der Malaien . Aus dem Malaiischen übertragen von Hans Overbeck. Edit. Eugen Diederichs, Iéna, 1927

Comprend une Introduction à la Littérature malaise la classant en différentes catégories et citant un grand nombre de textes en en indiquant le contenu, ainsi que :  la Couronne de tous les Princes  (Makota Segala Raja) et la  Chronique des Malais  (Sejarah Malayu) en traductions abrégées avec introductions et notes.

La traduction du Makota Segala Raja est basée sur la publication du texte malais faite par P. P. Roorda van Eysinga à Batavia en 1827. Celle du Sejarah Malayu est basée sur la publication des textes en écriture malaise (1896, 3ème édition 1913) et en écriture latine (1899, 2ème édition 1909) par W. G. Shellabear chez la Methodist Publishing House à Singapour.


N° 1822  Insulinde II. Malaiische Erzählungen : Romantische Prosa – Lustige Geschichten – Geschichten vom Zwerghirsch , aus dem Malaiischen übertragen von Hans Overbeck, Eugen Diederichs, Iéna, 1925

Débute sous le titre  Prose romantique , après une introduction, par cinq histoires du Penglipur Lara, le conteur itinérant dit « Consolateur des Peines », dont la première,  l’Histoire de Raja Muda , est traduite en entier, les quatre autres,  Malim Dewa, Malim-Deman, Awang Sulong Merah Muda et Anggun Tsche Tunggal , étant simplement résumées. Les  Histoires comiques  (Tscherita Jenaka), après une nouvelle introduction, sont composées de traductions abrégées de  Pa Pandok, Pa Kadok, Lebai Malang, Pa Bilalang et Si Luntschai . Puis viennent des  Histoires du cerf-nain , dont l’une est traduite entièrement :  l’Histoire de Sang Cerf-nain , et les deux autres sont résumées :  l’Histoire du rusé Cerf-nain  (Hikayat Pelanduk Jenaka) et  l’Histoire du Cerf-nain et des jeunes loutres . En postface : quelques commentaires et une bibliographie du cycle Cerf-nain.

La traduction des cinq histoires du Penglipur Lara est basée sur le texte publié par R. O. Winstedt dans les Malay Literature Series à Singapour. C’est également le cas des Histoires comiques – Cherita Jenaka. La traduction des Histoires de cerf-nain est basée sur une publication de O. T. Dussek en 1915 dans les Malay Literature Series de Singapour.


N° 4107  Malaiische Chronik / Hang Tuah , aus dem Malaiischen übersetzt von Hans Overbeck, Eugen Diederichs Verlag, Dusseldorf-Cologne, 1976

Préface du Professeur de l’Université de Francfort Otto Karow ; reprise du texte de la traduction de  Sejarah Malayu  de l’édition de 1927 ; extraits seulement de la traduction intégrale du  Hikayat Hang Tuah  de 1922 (200 pages au lieu de 600 et sans l’annexe) ; postface du Professeur Dr. Ulrich Katz, avec une biographie et une bibliographie complète des travaux de Hans Overbeck.


N° 4090 Rüdiger Siebert :  Deutsche Spuren in Indonesien, zehn Lebensläufe in bewegten Zeiten ,  Horlemann, 2002

Le journaliste allemand Siebert étudie les biographies de dix Allemands qui ont vécu en Insulinde à l’époque des deux guerres mondiales, dont Hans Overbeck justement, ce commerçant hanséatique qui a tant fait pour la connaissance de l’ancienne culture malaise et qui a pourtant été emprisonné deux fois, une fois en Australie pendant la première guerre mondiale, une autre fois en Indonésie d’abord pendant la deuxième, avant d’être transféré en Inde et mourir dans le naufrage du bateau qui devait l’y amener et qui était attaqué par des avions japonais. Dans le même naufrage est mort Walter Spies qui a eu l’importance que l’on sait dans le développement artistique de Bali. 


N° 4126  Histoire des rois de Pasey , traduit du malais par Aristide Marre, introduction et notes de Monique Zaini-Joubert, Editions Anacharsis, Toulouse, 2004

C'est le  Hikayat Raja Pasai , livre historique malais du Royaume de Pasai. La traduction d'Aristide Marre (Prof aux Langues'O), date de 1874. Cette Chronique concerne un moment de l’histoire ancienne de l’Indonésie (XIIème-XIVème siècles), celle de son premier royaume islamisé : le sultanat de Samudra-Pasai, sur la côte nord-est de Sumatra.


N° 4167 Dr. W. H. Rassers :  Pañji, the culture hero, a structural study of religion in Java , Martinus Nijhoff, The Hague, 1959 (Reliure cartonnée entoilée de l’éditeur)

Etude importante de l'ethnologue Rassers qui a mis en évidence les origines locales du théâtre d'ombres de l'Indonésie. Le Roman de Panji est une des sources de ce théâtre à côté des grandes épopées indiennes.


N° 4735 Louis de Backer :  Bidasari, poème malais , précédé des  Traditions poétiques de l’Orient et de l’Occident , Plon/Maisonneuve, 1875 (Reliure demi-cuir de l’éditeur)

Très beau conte, auteur anonyme, origine probablement antérieure à l’arrivée de l’Islam dans l’archipel. Louis de Backer (1814-1896), magistrat, était un amateur devenu érudit dans de nombreux secteurs. Il a repris la version néerlandaise faite par Van Hoeuvell qu’il a traduite en français.


N° 3292 Elizabeth D. Inandiak :  Les Chants de l’île à dormir debout – Le Livre de Centhini , avant-propos par Patrice van Eersel, Editions Le Relié, Gordes, 2002

 Le Livre de Centhini  est une épopée javanaise, quête mystique et érotique, dont les héros, deux princes et une princesse traversent mille et une aventures. L’origine ? Un puissant sultan du nord de Java, au début du XIXème siècle, demande à ses savants lettrés de parcourir l’île pour en recueillir les savoirs et les mythes et les rassembler dans une vaste épopée amoureuse et guerrière. Et voilà qu’une jeune romancière française ayant adopté l’Indonésie comme nouvelle patrie, s’y étant mariée, y ayant fait des enfants, devenue adepte du soufisme et ayant reçu le nom d’Indianak d’un combattant du Timor, s’intéresse à ce monument et s’y attaque en surmontant toutes les difficultés car la langue dans laquelle il est écrit, le javanais classique, est déjà en train de disparaître et les érudits qui sont encore capables de le déchiffrer se font de plus en plus rares… 



Littérature moderne

N° 3994 Georges Voisset :  Les Lèvres du Monde, littératures comparées de la Caraïbe à l’archipel malais , Les Perséides, Bécherel, 2008

Une fascinante étude de la culture et de la littérature malaise par le comparatiste et grand spécialiste du pantoun malais, Georges Voisset, qui était à l’époque, Professeur de littérature comparée à l’Université des Antilles-Guyane.


N° 4034  Lettres de Raden Adjeng Kartini – Java 1900 , édit. Forum Djakarta-Paris, Ecole française d’Extrême-Orient, 1999

Raden Adjeng Kartini était la fille d’un Javanais de la classe aristocratique qui était régent dans une région de forêts de Teck, célèbre pour ses sculptures sur bois et dont le chef-lieu est Blora (et dont est originaire Pramoedya). La fille Kartini, grâce à son père, avait été éduquée dans une école hollandaise, écrivait et parlait couramment le néerlandais, s’intéressait tout particulièrement à la question féminine et entretenait une abondante correspondance, entre autres, avec des féministes de l’époque, Rosa Abendanon-Mandri, l’épouse d’origine portoricaine du Directeur de l’éducation aux Indes néerlandaises (et de tendance « politique éthique ») et la Hollandaise Stella Zeehandelaar. Raden Adjeng Kartini est considérée comme la première féministe indonésienne. Elle fut très probablement forcée de se marier, parce que les autorités gouvernementales ont dû considérer à un certain moment qu’elle pouvait devenir un ferment de rébellion. C’était la technique communément utilisée pour réduire une jeune fille au silence. A peine une année plus tard (en 1904) Raden Adjeng Kartini est morte en couches à l’âge de 25 ans.

A propos de la Kartini, voir mon site  Bloc-notes 2011 Une fémiste indonésienne en 1900.


N° 4012 Pramoedya Ananta Toer :  This Earth of Mankind , traduit de l’indonésien (en anglais) par Max Lane, postface de Max Lane, Penguin Books, 1990

N° 4023 Pramoedya Ananta Toer :  Child of all Nations , traduit de l’indonésien (en anglais) par Max Lane, Penguin Books, 1991

N° 4024 Pramoedya Ananta Toer :  Footsteps , traduit de l’indonésien (en anglais) par Max Lane, introduction de Max Lane, Penguin Books, 1990

N° 4025  Pramoedya Ananta Toer :  House of Glass , traduit de l’indonésien (en anglais) par Max Lane, introduction de Max Lane, Penguin Books, 1992

Ces quatre livres constituent ce que l’on a appelé le Buru Quartet. C’était quelqu’un d’assez exceptionnel, cet homme que ses amis appelaient Pram. D’abord par sa personnalité : humaniste, généreux, tenace, fidèle à ses idéaux. Un écrivain, probablement le plus grand, en tout cas le plus important des écrivains indonésiens contemporains (il est mort en 2006). Et puis il y a sa vie, tout à fait extraordinaire. Né en 1925 il a encore connu l’époque coloniale. Il a été emprisonné par les Hollandais. Il a vécu l’occupation japonaise, s’est lié à Soekarno, ce qui ne l’a pas empêché d’être emprisonné par lui aussi pour avoir défendu la communauté chinoise. Il a été proche, sans en être membre, du Parti communiste indonésien. Et lors du renversement sanglant de Soekarno (en 1965) par Suharto aidé par la CIA, il a été envoyé dans un camp de travail dans la jungle, y est resté 14 ans dans des conditions terribles et a été interdit d’écriture pendant une bonne partie de son temps d’emprisonnement. Et une fois libéré, il a encore eu d’énormes problèmes pour se faire éditer, et d’ailleurs assez rapidement les premiers tomes de sa tétralogie qu’il avait appelée  Le Quatuor de Buru  (Buru était le nom de l’île où se trouvait son camp) ont été interdits. Le livre est partiellement basé sur la vie réelle d’un journaliste Tirto qui a effectivement combattu les Hollandais au début du XXème siècle. Max Lane n’est pas un traducteur professionnel mais était, je crois, attaché culturel à l’Ambassade d’Australie.

Voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 6 : P comme Pramoedya. Le Quatuor de Buru de Pramoedya Ananta Toer. Voir aussi le même texte, sans les digressions, sur mon site Carnets d'un dilettanteLe Quatuor de Buru de Pramoedya Ananta Toer.


N° 1345 Pramoedya Ananta Toer :  Le Fugitif , traduit de l’indonésien par François-René Daillie, Plon, 1991

Roman écrit dans les années 50 et traduit par François-René Daillie, le spécialiste du pantoun. Une très belle histoire, très poétique, d’un résistant à l’occupation japonaise en fuite dans la jungle.

N° 1344 Pramoedya Ananta Toer :  Corruption , traduit de l’indonésien par Denys Lombard, Philippe Picquier, 1991

Date des années 50 comme Le Fugitif, et raconte, comme son titre l’indique, la façon dont un petit fonctionnaire falot, honnête, se laisse gagner peu à peu par les fausses valeurs du pouvoir et de l’argent grâce aux compromissions et aux trafics d’influences

N° 3423 Pramoedya Ananta Toer :  Gadis Pantai, la Fille du Rivage , traduit de l’indonésien par François-René Daillie, Gallimard, 2004

Un hommage aux femmes indonésiennes courageuses mais complètement soumises aux hommes et incapables de maîtriser leur destin

N° 4039 Pramoedya Ananta Toer :  La vie n’est pas une foire nocturne , traduit de l’indonésien et présenté par Henri Chambert-Loir et Denys Lombard, Gallimard, 1993

Il s’agit de 4 nouvelles de caractère nettement autobiographique qui datent de l’époque de la décolonisation (1945-50) et qui décrivent les bouleversements que cela entraîne dans la société javanaise.


N° 4030 Anton Aropp :  Dissidence – Pramoedya Ananta Toer, itinéraire d’un écrivain révolutionnaire indonésien , Editions Kailash, Pondicherry/Paris, 2004

Très complète biographie de Pram et histoire de la lutte pour l'indépendance de l'Indonésie, ainsi que celle de la prise de pouvoir sanglante de Suharto.


N° 4191 Shanon Ahmad :  Le Riz , traduit du malais par Nicole Biros, Babel/Actes Sud, 1987

Le dur labeur du riz en Malaisie décrit de manière magistrale par un Professeur d’Université, fils de paysans


N° 4218 Abdul Samad Said :  Salina , traduit du malais par Laurent Metzger, L’Harmattan, 1997

Singapour dans la période de l’après-guerre quand on y connaissait encore le chômage, l’analphabétisme et la crise de logement. Laurent Metzger était Professeur à l’Université de Singapour avant de diriger un département de malais à Nantes


N° 4123 Sindhuta :  La Quête de Semar, conte philosophique javanais , édition bilingue, traduit de l’indonésien par Nathalie Belin Ridwan, avant-propos de Michel Cazenave, Collection du Banian/Association Pasar Malam, 2011

Semar est un personnage du théâtre d’ombres javanais


N° 4069 Djenar Maesa Ayu :  A travers les glaces , nouvelles, édition bilingue, traduit de l’indonésien par des élèves de l’Inalco sous la direction d’Etienne Naveau, préface de Bernard Chambaz, postface d’Etienne Naveau, Collection du Banian/Association Pasar Malam, 2011


N° 4124 Pak Prijana Winduwinata :  Intrigues de jungle et lois de basse-cour au royaume des animaux de Java , contes satiriques, traduit du javanais avec introduction et notes par Marcel Bonneff, Collection du Banian/Association Pasar Malam, 2012

Ces cinq contes animaliers sont un exemple rare de satire sociale et politique à l’époque des débuts de l’Indonésie indépendante sous Soekarno (1945 – 1967). Et, en plus, écrits en javanais alors que le malais-indonésien avait été décrété langue nationale. Marcel Bonneff avait été Directeur de Recherche au CNRS.


N° 4260 Gde Aryantha Soethama :  Ordeal by Fire , traduit (en anglais) de l’indonésien par Vern Cork, Arti Foundation, Bali, 2008

Excellente collection de nouvelles par un écrivain et journaliste balinais qui donnent une bonne idée des problèmes locaux : tourisme, religion, castes, etc. Vern Cork est Australien.


N° 4222 Oka Rusmini :  Earth Dance , traduit (en anglais) de l’indonésien par Rani Amboyo et Thomas M. Hunter, postface de Pamella Allen, Lontar, Djakarta, 2011

Oka Rusmini est une importante écrivaine originaire de Bali qui évoque dans la plupart de ses romans les problèmes que pose encore aujourd’hui le système des castes balinais. Des problèmes dont souffrent avant tout les femmes lorsque l'un des membres d'un couple marié est d'une haute caste et l'autre un non-caste !


Pour ces deux écrivains balinais, voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 6 : B comme Bali. Bali île bénie ou île salie ? Et aussi mon Bloc-notes 2019 : Oka Rusmini, castes et femmes à Bali.


Thaïlande 


N° 4734 P. Schweisguth : Etude sur la littérature siamoise, Libr. d'Amérique et d'Orient, Adrien Maisonneuve, Paris, 1951 

Ouvrage publié avec le concours du CNRS. Schweisguth était un élève de R. Lingat et G. Coedès. Intéressante étude sur une littérature peu connue d'une des branches de la famille linguistique thaïe, celle du bassin du Ménam, aujourd'hui Thaïlande. On y trouve même des berceuses pour éléphants !

Et un genre poétique original : les nirat, des récits de départs pleins de descriptions de la nature et des paysages traversés et de l'amour pour l'aimée qu'on a quittée. Voir mon Bloc-notes 2023les nirat siamois


Philippines


N° 4028 José Rizal :  N’y touchez pas ! , traduit de l’espagnol par Jovita Ventura Castro, préface d’Etiemble, Gallimard/Unesco, Connaissance de l’Orient, 1980

N° 2419 Charles Edward Russell et E. B. Rodriguez :  The Hero of the Filipinos, the story of José Rizal, poet, patriot and martyr , George Allen & Unwin, Ltd., Londres, 1924 (hard cover de l’éditeur, illustré avec des photographies)

Il faut savoir que les Philippines ont produit un homme vraiment exceptionnel, probablement l’homme le plus remarquable de toute l’Asie du Sud-Est, José Rizal. Il avait fait des études complètes de médecine, s’était même spécialisé en Europe en ophtalmologie et a réalisé la première opération des yeux aux Philippines. Il avait aussi fait des études de philosophie et s’était même intéressé à l’ethnologie. Et il a eu des réflexions intéressantes en ce qui concerne le racisme. Il était aussi poète, même sculpteur et dessinateur, et bien sûr écrivain. Son très beau roman,  Noli me tangere , a réellement mis le feu aux poudres. C’est un roman tout à fait étonnant. D’abord par sa forme : les descriptions drolatiques et sarcastiques alternent avec les scènes les plus dramatiques. Mais c’est surtout une attaque directe des aspects superstitieux de la religion (mais qui rapportent financièrement aux congrégations) et des religieux qui commandaient véritablement aux Philippines et qui allaient poursuivre José Rizal de leur haine.

La conspiration qui a été à l’origine de la Révolution Philippine n’était pas le fait de Rizal (il était opposé à la violence) mais celle d’un ouvrier autodidacte, Andres Bonifacio, excellent organisateur et futur chef de guerre. Si Rizal est d’abord condamné à l’exil, c’est à cause de son livre. Mais quand la conspiration de Bonifacio est découverte et que le nom de Rizal y apparaît parce que Bonifacio avait cru bon de l’y impliquer à son insu, il est condamné à mort et fusillé. Ce qui eut lieu, malgré une opinion publique européenne unanimement choquée, le 30 décembre 1896. Il avait 35 ans.  Noli me tangere  avait paru 9 ans plus tôt, en 1887.

Le roman témoignage de José Rizal est déjà mentionné dans la liste Littérature hispanophone.

Je parle longuement de José Rizal dans une digression dans mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 6 : P comme Pramoedya. Le Quatuor de Buru de Pramoedya Ananta Toer.